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Activités Physiques Adaptées : Quand le sport et la santé vont de
paire
Encore
méconnu du public et pourtant promis à un grand avenir, le métier de professeur
d’Activités Physiques Adaptées (APA) ne cesse de se développer. Nous avons
rencontré Stéphane Dijoux, enseignant de cette discipline qui œuvre au
quotidien pour apporter des prises en charge adaptées aux besoins biologiques
et psycho-sociaux des personnes en situation de handicap, quel que soit leur
âge.
Comment
avez-vous découvert cette activité ?
Stéphane
Dijoux : Après une première année d’études en psychologie, j’ai découvert par
hasard en 1999-2000, l’existence d’une option « Activités Physiques
Adaptées » proposée par la Faculté des Sciences et Techniques des Activités
Physiques et Sportives (STAPS). Féru de sport et sensible aux handicaps, je m’y
suis inscrit l’année suivante.
En
quoi consiste la formation ?
Stéphane
Dijoux : Nous disposons d’une
formation
universitaire sur l'activité physique et sportive et la santé, de niveau
bac+3, bac+5 voire Bac+8 pour certains… En ce qui me concerne, une partie de ma
formation s’est déroulée au sein du service de Soins de Suite et de
Réadaptation (SSR) de Salins Les Bains, dispensée par le médecin-chef et les
Enseignants en Activité Physique Adaptée et Santé (EAPA-S). J’ai eu alors la
chance d’être sensibilisé aux diverses approches proposées par des équipes
pluridisciplinaires : Educateurs Spécialisés, Assistantes Sociales,
Psychologues, Professeurs APA-Santé, Ergothérapeutes, Psychomotriciens,
Kinésithérapeutes, Educateurs Sportifs, etc.
Et
votre parcours professionnel ?
Stéphane
Dijoux : Je suis devenu Professeur APA-S en 2005 au service de Soins de Suite
et de Réadaptation (SSR) Polyvalent de l’hôpital Local Loewel/Haslach de
Munster en Alsace. En parallèle de mon activité, je me suis engagé pour la
reconnaissance de la profession, notamment en devenant membre de la
Société Française des Professionnels
en Activités Physiques Adaptées (SFP-APA) et en participant à plusieurs
travaux engagés par cette association. Je participe enfin à différentes
commissions thématiques mises en place par ce réseau (psychiatrie,
réglementations, réhabilitation respiratoire, obésité et diabète, cancer
etc...)
Face
à l’intérêt grandissant de la thématique de l’activité physique des seniors, la
SFP-APA travaille en outre à la mise en place d’une commission « APA et
personnes âgées ».
Qu’est-ce
que l’APA et quel est son rôle ?
Stéphane
Dijoux : Le terme APA pour Activité Physique Adaptée est né au Québec en 1970.
En France, la formation universitaire STAPS APA s’est développée à partir des
années 1980, et la mention APA est apparue dans l’intitulé du diplôme en 1999.
Les APA regroupent l’ensemble des Activités Physiques et Sportives, adaptées
aux capacités de la personne. Elles sont dispensées auprès des personnes en
situation de handicap, et/ou vieillissantes, atteintes de maladie chronique, ou
en difficulté sociale, à des fins de prévention, de rééducation, de
réadaptation, de réinsertion et d’éducation.
C’est
pendant mes années d’études que j’ai réellement pris conscience du rôle de
l’APA. J’ai pu voir les difficultés que les personnes en situation de handicap
rencontrent dans leur vie quotidienne. Franchir un trottoir, une pente ou un
simple escalier quand on se déplace en fauteuil roulant par exemple, mais
également face au regard des autres (condescendance, pitié, ignorance,
peur…)
Dans
quels types de structure les professeurs d’APA interviennent-ils ?
Stéphane
Dijoux : La liste est longue, nous intervenons dans plusieurs branches comme le
secteur sanitaire (hôpitaux, cliniques, Soins de Suite et de Réadaptation
(SSR), Centre de Rééducation Fonctionnelle), le secteur médico-éducatif
(Institut Médico-Educatif (IME), Maisons d’Accueil Spécialisé (MAS), Institut
Thérapeutique, Educatif et Pédagogique) ou encore le secteur médico-social
(principalement en maison de retraite).
Comment
se passe la prise en charge d’un patient ?
Stéphane
Dijoux : Pendant un séjour en service de rééducation/réadaptation, la prise en
charge en APA-S commence par un entretien avec le patient. Après l’évaluation
de ses capacités, nous lui proposons un programme personnalisé basé sur une ou
plusieurs activité(s) physique(s). La prise en compte des retours du patient au
sujet des séances et de ses ressentis est importante et nous permet d’analyser
le bilan de sa prise en charge.
La
profession est assez récente et encore méconnue, à quoi attribuez-vous ces
faits ?
Stéphane
Dijoux : Les premiers Professeurs d’Education Physique sous l’autorité du corps
médical et au service de la santé existent depuis le début du 19ème siècle donc
je ne parlerai pas d’une profession récente. Néanmoins, après avoir été exercée
jusque dans les années soixante, l’éducation physique et sportive a laissé
progressivement de côté le domaine de la santé pour y revenir 1982, avec la
création du diplôme Activité Physique Adaptée (APA), qui est devenu Activité
Physique Adaptée et Santé en 2007(APA-S).
La
méconnaissance de la profession est due, dans un premier temps, au manque
d’intérêt des pouvoirs publics pour l’APA dans un but de santé, mais aussi d’un
manque de publications scientifiques (intervention basée sur les preuves) pour
justifier de son intérêt.
De
nombreux stéréotypes perdurent également, d’ailleurs, je vous laisse imaginer
les freins auxquels les premiers « Profs APAS » ont été confrontés de la part
de certains professionnels de santé ou encore des familles, lorsqu’ils ont
proposé à des publics fragilisés par l’âge, la maladie ou le handicap de
reprendre la marche, le vélo, de faire de la musculation ou de la gymnastique !
Enfin,
nous sommes encore trop peu nombreux dans certaines structures et les moyens
financiers et matériels sont souvent réduits. Malgré cela, et depuis 2008, tout
cela tend à changer car la reconnaissance et l’intérêt pour l’APA en général
sont en train d’apporter un nouveau souffle à la profession.
L’enseignant
en APA est-il un éducateur sportif ou un professionnel de santé ?
Stéphane
Dijoux : Un peu des deux ! Nous devons nous déclarer auprès de l’administration
représentant le ministère des Sports en région qui nous délivre notre carte
professionnelle d’éducateur sportif, donc oui, nous faisons partie des
professionnels de l’activité physique et sportive, mais notre profession,
au-delà du simple enseignement et de l’encadrement sportif, éduque aussi nos
patients à la santé. Elle conçoit des programmes d’APAS, les présente et les
met en place. Comme par exemple dans le secteur sanitaire, où nous intervenons
sur prescription médicale, en nous inscrivant pleinement dans le projet de
soin, comme les autres professionnels de la santé.
L’APA
concerne-t- elle seulement les seniors ?
Stéphane
Dijoux : L’APA-Santé concerne toutes les personnes avec des déficits et des
incapacités, des problèmes de santé ou à risques. Elle s’adresse aux enfants,
aux adolescents, aux adultes, aux seniors et aux centenaires. Qu’ils soient en
institution (IME, IMPRO, MAS, EHPAD, Maison de retraite, SSR), en milieu
scolaire ou à domicile.
Vous
intervenez au sein d'équipes pluridisciplinaires, comment se passe la
collaboration avec les autres professionnels ?
Stéphane
Dijoux : Malgré des débuts difficiles avec certains collègues, la collaboration
avec les différents professionnels (médical, paramédical, soins, techniques, …)
est, pour ma part, plutôt bonne, voire très bonne. Travailler ensemble, avec un
même objectif mais des approches différentes et dans le respect mutuel, est un
vrai plus pour les patients.
Certaines
difficultés sont parfois liées à la méconnaissance de nos compétences. Je
comparerai ça à l’entrée des ergothérapeutes dans le milieu de la rééducation,
qui fut difficile avec certains professionnels et où chacun travaillait de son
côté pour éviter le conflit, avant qu’ils apprennent à travailler ensemble.
L’APA-S se développe, les formations se diversifient et deviennent
pluridisciplinaires (par exemple : à Grenoble existe une formation conjointe
kiné/APA-S) et ces difficultés, j’en suis sûr, s’atténueront et/ou se régleront
avec le temps.
Pour
conclure, quels sont les besoins de votre profession aujourd’hui ?
Stéphane
Dijoux : L’APA-S est un domaine passionnant, dont le développement est une
évidence doublée d’une nécessité. Cela passe par une meilleure reconnaissance
de la profession.
Pour
reprendre les propos de Madame la
Ministre Valérie Fourneyron : « Le sport plutôt qu’une longue
liste de médicaments, le sport qui permet de diminuer l’hypertension ou
l’insuline de nos diabétiques, c’est une idée qui doit faire son chemin. Le
sport joue un rôle thérapeutique. Cela doit être dit et redit sans cesse par
les médecins, ainsi que par les professionnels de la santé…Les personnes « à
besoins particuliers » méritent également toute notre attention : je pense aux
seniors en perte d’autonomie ou aux personnes atteintes de pathologies
chroniques. Tous ceux pour lesquels l’activité physique encadrée est
particulièrement recommandée ».
François
Hollande aime rappeler que la crise ne rend pas le sport moins nécessaire mais
qu’elle le rend encore plus indispensable. Avec Marisol Touraine, nous nous
inscrivons complètement dans ce propos. Nous voulons inscrire dans la durée cette
ambition partagée, interministérielle, de faire du sport un outil majeur de
santé publique dans notre pays. » Nous ne pouvons que souhaiter que ces
discours deviennent des actes cohérents.
Propos recueillis par G.Gauthier le 21 Février 2014
Liens utiles : www.cnp-apa.sfp-apa.fr ; www.sfp-apa.fr
; www.activites-physiques-adaptees.fr ;